J’ai lu "Devenir autre - Hétérogénéité et plasticité du soi"
de David Berliner, édition La découverte
David Berliner est anthropologue et enseignant à l’université libre de Bruxelles. Dans son essai Devenir Autre, il s’interroge sur la manière dont les humains composent avec l’hétérogénéité et la plasticité du soi ; il invite le lecteur à questionner le paradigme de l’individu cohérent et constant pour l’enrichir de celui d’un être multiple et malléable, en devenir.
Berliner explore l'hypothèse selon laquelle le soi serait toujours "plus fragmenté et malléable qu'on ne peut le penser" à partir d’expériences particulières d’identifications à d’autres : lorsqu’un anthropologue s’immerge dans une culture, qu’un « cosplayeur » incarne son personnage de dessin animé favori, qu’un sosie de Napoléon rejoue la bataille de Waterloo, quand Romain Gary signe Emile Ajar, ou quand Charles Foster, vétérinaire et philosophe, se met dans la peau d’un blaireau, ont-ils pour objectif de se débarrasser de leur identité propre et de devenir cet autre ? Quelles conséquences cela a-t-il sur leur être au monde ?
Ce livre soulève plusieurs questions qui m’ont beaucoup intéressée :
Ainsi, on entend souvent que ceux qui jouent à être un autre, les sosies, les cosplayeurs, les acteurs dans les jeux de rôle grandeur nature, seraient des personnes fragiles, « mal dans leur peau » qui chercheraient, à travers ces expériences, à fuir le monde « réel ». Mais à travers de nombreux témoignages, l’auteur soutient l’idée que ces expériences identificatoires, souvent ludiques, leur permettraient d’enrichir leur soi et qu’ils développeraient parfois des parties d’eux-mêmes « en sommeil » en s’appropriant des caractéristiques de leurs personnages. Certains peuvent aussi dire qu’en devenant autre, ils retrouvent leur « noyau » profond d’être humain.
Par ailleurs, dans une époque où on assiste à une montée des « identitarismes » et des communautarismes, la question de l’empathie, de la capacité à se mettre à la place de l’autre pour tenter de partager son vécu et sa vision du monde est éminemment critique. Le fait de vouloir entrer « dans la peau d’un autre » est un moyen de partir à sa rencontre.
Enfin, à l’heure des débats sur les questions du genre et de la race, la fluidité de genre semble mieux acceptée par nos sociétés que celle de la couleur de peau ou de la race. Ainsi, l’ouvrage de David Berliner soulève également cette question : Qui peut jouer à être qui ?
Gaëlle Abeille
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